Attentes, espoirs et craintes des chefs d’entreprise & des salariés concernant la Présidentielle

L’Observatoire Social de l’Entreprise, réalisé par Ipsos et le CESI en partenariat avec Le Figaro, permet de faire régulièrement le point sur le moral des chefs d’entreprise et des salariés du secteur privé, mais aussi d’approfondir un thème en lien avec la vie de leur entreprise. La 11e vague de cet observatoire est ainsi consacrée à l’élection présidentielle de 2017, et plus particulièrement aux attentes, aux espoirs et aux craintes des chefs d’entreprise et des salariés concernant le prochain quinquennat.

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Vincent Dusseaux Directeur d'études, Ipsos Loyalty
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Faut-il réformer en profondeur les règles qui s’appliquent aux entreprises et aux salariés ? Quel rythme de réforme est à privilégier ? Quelles sont les réformes jugées les plus efficaces pour relancer la croissance et l’emploi ? Quel candidat à l’élection présidentielle est le plus crédible sur ces sujets ?

La proximité de l'échéance de l'élection Présidentielle ne suscite pas de réel regain d'optimisme des chefs d'entreprise et des salariés

Perspectives à 6 mois : les chefs d’entreprise sont à nouveau très prudents sur leur activité économique et toujours peu confiants dans une reprise de la croissance.

Alors qu’au premier semestre 2016 l’optimisme sur les perspectives économiques gagnait du terrain, l’évolution du moral des chefs d’entreprise est plus contrastée dans cette vague.

Invités à se prononcer d’une manière générale sur leurs perspectives d’activité, les chefs d’entreprise ne sont plus que 18% à envisager une hausse dans les six prochains mois, un chiffre en recul de 3 points par rapport au premier semestre 2016. Dans le même temps, le nombre de patrons qui tablent sur une baisse d’activité est presqu’à son plus bas niveau (19%, -1). La grande majorité table sur une stabilité de leur activité (63%, +7 points). Vague après vague, la croissance reste un pronostic très minoritaire et les espoirs de reprise ne sont pas là même si la situation ne s’aggrave pas. La prudence des chefs d’entreprise fait écho au regard très sombre qu’ils portent sur la situation de l’économie de la France. Pour près d’un sur deux (46%), celle-ci va se dégrader dans les mois qui viennent, contre 44% pour qui elle va rester stable et 10% seulement qu’elle va s’améliorer.

Le contraste est toujours aussi saisissant entre les grandes et les petites structures. Ainsi, 46% des patrons des entreprises de plus de 500 salariés envisagent une progression de leur activité alors que ceux des entreprises de 1 à 9 salariés se montrent beaucoup plus prudents : 16% seulement tablent sur une activité en croissance. Des différences apparaissent également selon le secteur d’activité, mais elles sont un moins nettes. L’optimisme est un peu plus présent dans le commerce (20%), les services (19%) et l’industrie (18%) mais plus faible dans le bâtiment (14%).

Des chefs d’entreprise qui restent majoritairement optimistes dans leur capacité à sauvegarder les emplois tandis que les perspectives d’augmentation des salaires restent minoritaires même si elles progressent très légèrement.

Malgré tout, lorsqu’on approfondit le questionnement sur l’évolution de leur activité à six mois, l’optimisme des patrons et plus affirmé et même en progression sur certaines dimensions. Ainsi, la majorité des chefs d’entreprise se dit optimiste quant au niveau de stress de leurs salariés dans les six prochains mois. 68% sont confiants à ce sujet, -5 points par rapport au premier semestre 2016 mais cette baisse doit être relativisée car elle fait suite à une forte hausse). Ils sont également optimistes quant au maintien de l’emploi dans leur entreprise (67%, -4 après une hausse de 4 points au premier semestre 2016) et quant à la possibilité de proposer des formations à leurs salariés (61%, +1).

Même si les avis sont plus partagés sur le développement économique du secteur d’activité de leur entreprise ou l’augmentation des salariés, la confiance progresse de façon continue depuis deux ans sur ces dimensions. 55% sont optimistes concernant le développement de leur secteur (+3 par rapport au premier semestre 2016 et +23 par rapport à mars 2015) de même que 46% sont confiants au sujet de l’augmentation des salaires (+4 par rapport au premier semestre 2016 et +23 par rapport à mars 2015).

Enfin, l’optimisme reste minoritaire en ce qui concerne la capacité à embaucher (31%) mais en constante progression : +2 points par rapport à avril 2016 et +19 par rapport à mars 2015. Ces éléments constituent à n’en pas douter un signal encourageant pour la situation des entreprises et de l’économie française.

Ces éléments font écho aux jugements toujours très positifs des chefs d’entreprise sur la situation interne au sein de leur entreprise, même si les évolutions sur cette question sont plus contrastées. Les jugements positifs sont très largement majoritaires en ce qui concerne les relations entre les salariés et leurs supérieurs hiérarchiques directs (96%, =), la charge de travail (82%, +4), l’adhésion des salariés aux grandes orientations de l’entreprise (79%, -5), le climat social en général (77%, -1), les rémunérations (73%, -3) ou l’emploi (65%, -1).

Comme les chefs d’entreprise, les salariés tablent en majorité sur une stabilité de l’activité de leur entreprise, moins d’un tiers d’entre eux anticipent de la croissance

Plus d’un salarié du privé interrogé sur deux (56%) anticipe une activité stable pour les six prochains mois. Cette opinion progresse de 4 points par rapport au premier septembre 2016, au détriment de ceux qui envisagent une baisse d’activité (13%, -3).

L’optimisme des salariés est quant à lui minoritaire et stable par rapport au premier semestre 2016. 31% (-1) tablent sur une progression de l’activité de leur entreprise. Cette opinion est beaucoup plus fréquente chez les salariés que chez les chefs d’entreprise. Cette différence s’explique comme l’an passé par le poids des grandes entreprises au sein de l’échantillon de salariés : il y a en effet plus de salariés qui travaillent dans les grandes entreprises. Or, à l’instar des chefs d’entreprise, les salariés des grandes entreprises sont beaucoup plus optimistes : 42% envisagent une croissance d’activité, contre 19% seulement dans les entreprises de 1 à 9 salariés.

Des salariés toujours majoritairement pessimistes sur la capacité à embaucher et à augmenter les salaires au sein de leur entreprise…

Les indicateurs détaillés sur les perspectives d’activité de l’entreprise sont marqués par une forte stabilité par rapport au premier semestre 2016. Les salariés se montrent toujours un peu plus optimistes que les chefs d’entreprise quant au maintien de l’emploi dans leur établissement (75%, +1 contre 67% chez les chefs d’entreprise), au développement économique du secteur d’activité de leur entreprise (60%, +1 contre 55% pour les chefs d’entreprise) et à la capacité à embaucher (39%, +1 contre 31% chez les chefs d’entreprise).

L’écart entre l’avis des chefs d’entreprise et des salariés est beaucoup plus marqué dans d’autres domaines. C’est le cas en particulier du niveau de stress. Seuls 38% (=) des salariés sont optimistes sur ce point, un résultat en complet décalage avec le point de vue des dirigeants (68%). Enfin, la confiance est très minoritaire chez les salariés quant aux augmentations de salaires et de pouvoir d’achat (25%, +2, contre 46% chez les chefs d’entreprise).

Par ailleurs, invités à se prononcer sur la situation interne de leur entreprise, les salariés sont comme à l’accoutumée nettement moins positifs que les dirigeants sur la plupart des dimensions testées. C’est le cas notamment du climat social (55%, -1 des salariés le jugent bon, contre 77% des chefs d’entreprise), de la charge de travail (52% considèrent que la situation est satisfaisante, -4 contre 82% des chefs d’entreprise), de l’adhésion des salariés aux grandes orientations de l’entreprise (51%, +3 contre 79% des chefs d’entreprise) et des rémunérations (45%, +3 contre 73% des chefs d’entreprise).

Si l’optimisme des salariés s’améliore très légèrement en ce concerne les rémunérations au sein de leur entreprise, les inquiétudes sur ce sujet restent cependant très vives et tendent plutôt à se renforcer. La nouvelle vague de l’observatoire confirme que le niveau des salaires est la première préoccupation des salariés avec 30% de citations (+1 après +3 au première semestre 2016). L’inquiétude sur les conditions de travail continue quant à elle de reculer (17%, -1 après -3). Les préoccupations liées au maintien de son emploi restent stables au deuxième rang (26%). Cet aspect est davantage souligné par les ouvriers (32%).

Et en ce qui concerne la situation économique du pays, la majorité des salariés anticipe une dégradation : les deux tiers des ouvriers sont pessimistes.

En écho à l’inquiétude sur le maintien de leur emploi, les salariés se montrent très pessimistes sur la situation économique du pays, plus encore que les chefs d’entreprise. Pour 56% d’entre eux, la situation économique du pays va se dégrader dans les mois qui viennent (contre 46% des chefs d’entreprise). Les ouvriers se montrent particulièrement pessimistes : 63% d’entre eux anticipent une dégradation de l’économie française dans les prochains mois (contre 53% des professions intermédiaires et 46% des cadres).

Malgré ces inquiétudes, le potentiel de mobilisation en cas de déclenchement d’un mouvement social reste stable. 51% (+1) des salariés interrogés dans l’enquête déclarent qu’ils pourraient prendre part à un tel mouvement contre 49% (-1) qui n’y participeraient pas. 

Espoirs et craintes des chefs d'entreprise et des salariés dans la perspective de l'élection Présidentielle de 2017

A l’heure où les candidats déclarés à l’élection présidentielle dévoilent ou précisent leur programme politique, Ipsos et le CESI ont souhaité dresser un bilan des attentes des chefs d’entreprise et des salariés du secteur privé pour le prochain quinquennat. C’est l’objet du volet thématique de cette vague qui comprend des questions inédites sur les candidats, les mesures et des questions de rappels sur les attentes en matière de réformes déjà posées en 2015 lors d’une précédente vague de l’Observatoire. Les résultats donnent à voir les espoirs et les craintes des chefs d’entreprise et des salariés dans la perspective de l’élection présidentielle de 2017.

Chez les chefs d’entreprise, la demande de réformes en profondeur fléchit mais reste majoritaire

Chez les chefs d’entreprise, la nécessité de conduire des réformes fait toujours consensus, mais la crainte de blocage modère probablement les attentes. Certes une majorité d’entre eux (58%) plaide pour une réforme en profondeur des règles qui s’appliquent aux entreprises et aux salariés (code du travail, charges, financement des retraites et de la protection sociale) en mettant à plat tous les sujets, y compris les plus délicats, mais leur nombre baisse fortement par rapport à 2015 (-9 points). La séquence de 2016 sur la loi travail et ses cortèges de manifestations a laissé des traces dans l’esprit des dirigeants. Fin 2016, 37% (+8) d’entre eux privilégient plutôt des aménagements afin de contribuer à résoudre les problèmes les plus importants mais sans risquer de blocage social. La demande de réforme reste cependant très forte dans cette cible et le statut quo n’est pas une attitude envisageable pour eux : 5% seulement pensent qu’il ne faut rien changer à la situation actuelle.

Chez les salariés, un souhait de réforme beaucoup plus modéré : des aménagements mais sans risquer le blocage social

La réforme apparait également pour les salariés comme une véritable nécessité qu’il est difficile de remettre en question. L’idée d’une rupture avec la situation actuelle est présente dans cette catégorie mais pas majoritaire comme chez les chefs d’entreprise. 41% des salariés souhaitent des réformes en profondeur y compris sur les sujets les plus délicats. Comme chez les chefs d’entreprise, cette idée est en forte baisse par rapport à 2015 (-12 points). En revanche, 50% (+11) des salariés privilégient des aménagements pour éviter les blocages. Les plus demandeurs de réformes en profondeur sont les cadres (47%), les sympathisants LR-UDI (50%) mais aussi les sympathisants PCF-Front de Gauche (48%), signe d’une forte insatisfaction sur la situation actuelle dans cette catégorie.

Si les salariés souhaitent moins la rupture que les chefs d’entreprise, il n’en demeure pas moins que leurs attentes en matière de réformes sont réelles comme le montre leur arbitrage entre chômage et sécurité de l’emploi. 63% (-3) des salariés privilégient un système dans lequel le nombre de chômeurs est faible, quitte à ce que la sécurité de l’emploi soit limitée, tandis qu’ils ne sont que 37% (+3) à préférer un système où la sécurité de l’emploi est forte mais avec une proportion de chômeurs importante. Cette deuxième option, qui s’apparente au système qui prévaut actuellement en France, n’a la préférence que d’une minorité de salariés interrogés.

Enfin, en dépit de la récente séquence sur la loi travail et de la forte contestation qu’elle a provoquée, le sentiment qu’il n’y a pas eu assez de réformes dans les règles qui s’appliquent aux entreprises et aux salariés reste important. 43% (-6) des salariés sont de cet avis (contre 29%, +4 pour qui il y en a eu trop et 28%, +2 suffisamment).

Assisterait-on actuellement à une évolution des mentalités sur la réforme dans un pays que l’on dit volontiers « irréformable » ? Rien est moins sûr car les interviewés expriment toujours de nombreuses réticences vis-à-vis de la réforme qui tient en grande partie au sentiment, communément partagé, que les réformes sont souvent douloureuses et inefficaces.

Des craintes associées à la réforme qui persistent : le risque de plus avoir à y perdre qu’à y gagner

Ainsi, les salariés se montrent toujours très partagés quand il s’agit de faire le calcul « coût/bénéfice » des réformes. 56% (+3) estiment qu’on a plus à gagner en réformant qu’à perdre. Mais surtout, près d’un sur deux (44%, -3) considère au contraire qu’on a plus à perdre qu’à gagner, signe que la réforme est aujourd’hui encore appréhendée avec beaucoup de craintes.

La réforme est donc loin d’être perçue positivement par les interviewés. Autre indicateur : lorsqu’on demande aux salariés de choisir le sentiment qui correspond le mieux à leur état d’esprit au sujet de la réforme, c’est « l’inquiétude » qui est le plus fréquemment cité, loin devant tous les autres (53% de citations, +3). « L’espoir » arrive en deuxième position, mais avec seulement 18% (+3) de citations. Il est suivi de la « colère » (14%, -4), de « l’indifférence » (11%, -2) et de la « satisfaction » (4%, =).

Dans ce contexte marqué par une forte ambivalence des interviewés vis-à-vis de la réforme (ils sont à la fois très enclins à réformer et en même temps très inquiets quant aux conséquences concrètes des réformes), quelles sont les attentes des acteurs du monde du travail pour le prochain quinquennat ? Et quel est leur état d’esprit alors que la campagne pour l’élection présidentielle est désormais bien lancée ?

Une élection qui suscite beaucoup de craintes chez les salariés, plus d’optimisme chez les chefs d’entreprise

En pensant à la prochaine élection présidentielle, un sentiment d’inquiétude prévaut chez les chefs d’entreprise et les salariés. Il faut dire que le contexte dans lequel l’enquête a été réalisée n’est pas franchement favorable à la confiance : la défiance à l’égard de la classe politique atteint des records et l’incertitude persiste sur l’offre politique à gauche après l’annonce du chef de l’Etat de ne pas se représenter.

Le tableau est particulièrement sombre pour les salariés qui sont 63% à évoquer un sentiment d’inquiétude vis-à-vis de cette élection. Il est suivi de la méfiance (54%) et la résignation (34%). Le premier sentiment positif, l’espoir, n’arrive qu’en quatrième position dans la hiérarchie. La confiance (8%) et l’enthousiasme (6%) ne sont que très peu évoqués. A noter que le sentiment d’inquiétude est particulièrement fort à gauche (80% au Front de Gauche et 77% au PS). Sans doute l’incertitude qui plane sur l’offre de ce côté de l’échiquier politique renforce le sentiment d’inquiétude chez une partie des salariés, de même que la crainte que la gauche soit éliminée dès le premier tour du scrutin.

Même si l’enthousiasme est loin d’être de mise chez les chefs d’entreprise, leur état d’esprit est nettement meilleur que celui des salariés. Certes 51% ressentent un sentiment d’inquiétude en pensant à l’élection présidentielle, mais l’espoir fait chez les dirigeants une belle percée, avec 42% de citations (en deuxième place ex-aequo avec la méfiance). La situation est toutefois contrastée dans les différents secteurs d’activité. L’espoir est en tête dans le secteur des services mais en retrait dans l’industrie (28%) et le bâtiment (33%) où la méfiance prévaut (respectivement 57% et 46%).

Thèmes et rythme des réformes : les chefs d’entreprise et les salariés expriment des attentes divergentes

Quelles sont les attentes à l’égard du prochain quinquennat ? Pour les chefs d’entreprise, un sujet domine tous les autres : la fiscalité. C’est le thème qu’ils souhaitent que le prochain président de la République traite en priorité (69%), loin devant le chômage (31%), l’âge de départ à la retraite (28%) ou la durée hebdomadaire du travail (25%). Ces questions sont moins citées, non pas parce qu’elles ne sont pas importantes aux yeux des chefs d’entreprise, mais parce que cela leur semble moins prioritaire que la fiscalité.

Les priorités sont plus variées pour les salariés. En écho au regain de crispation sur le niveau des salaires, le premier sujet qu’ils souhaitent voir abordé est les rémunérations (50%). Il est suivi de l’âge de départ à la retraite (39%), la sécurité de l’emploi (36%) et le chômage (35%), signe que les salariés se montrent très préoccupés par des questions.

Les divergences entre chefs d’entreprise et salariés s’observent également quant au rythme des réformes. Une très large majorité de chefs d’entreprise (70%) privilégie le lancement d’un maximum de réformes en début de quinquennat pour profiter de la légitimité que confère le scrutin. Ils voient sans doute là une manière de conduire des réformes importantes tout en évitant le blocage du pays. Les salariés sont d’un avis différent : 55% plaident pour un espacement des réformes dans le temps (contre 45% pour le lancement d’un maximum de réformes en début de quinquennat).

Des chefs d’entreprise favorables à de nombreuses pistes de réforme, des salariés qui font preuve d’ouverture sur de nombreux sujets

Quelles sont aux yeux des salariés et des chefs d’entreprise les réformes à mener dans le pays pour relancer la croissance et l’emploi ? Celles qui auraient un impact réel sur l’économie du pays ? Celles que les chefs d’entreprise et les salariés sont prêts à accepter ? Celles qui sont rejetées ? Les interviewés soulignent l’efficacité d’un grand nombre de propositions testées. Et si des résistances persistent quant à leur mise en application, en particulier chez les salariés, d’autres sont plutôt bien accueillies par cette catégorie.

Les chefs d’entreprise saluent l’efficacité d’un grand nombre de mesures testées. C’est le cas en particulier d’une réforme de l’assurance chômage permettant la réduction et la dégressivité des allocations (que 75% jugent efficace pour relancer la croissance et l’emploi), de la suppression des 35 heures en laissant le soin aux partenaires sociaux de négocier le temps de travail (72%), de la revalorisation de l’accord d’entreprise comme norme prioritaire (67%), de l’instauration du référendum d’entreprise (65%) et de l’introduction du motif de réorganisation dans les procédures de licenciement (59%).

Les dirigeants sont un peu plus partagés sur la mise en place d’un contrat de travail unique sur le modèle du CDI mais avec des droits progressifs en fonction de l’ancienneté du salarié (54% jugent cette piste efficace pour relancer la croissance et l’emploi) ou l’autorisation du travail le dimanche payé en heures supplémentaires. Sous doute redoutent-ils la complexité de ce type de dispositif, à l’instar du compte pénibilité. Enfin, le report de l’âge de la retraite à 65 ans ne suscite guère d’enthousiasme chez les chefs d’entreprise : 47% jugent cette solution efficace pour relancer la croissance et l’emploi, contre 52% qui sont d’un avis contraire.

Du côté des salariés, les réticences sont sans surprise plus grandes à l’égard de ces mesures, mais il est intéressant de noter qu’une partie d’entre eux se montre néanmoins assez ouverte à certains sujets considérés parfois comme tabou. C’est le cas notamment des mesures qui visent à faire de l’entreprise l’échelon prioritaire du dialogue social. 66% des salariés interrogés jugent efficace le fait de donner la priorité à l’accord d’entreprise, 36% souhaitent une telle mesure. De même, 71% des salariés du privé jugent efficace l’instauration du référendum d’entreprise en cas de blocage du dialogue social. Près d’un sur deux (48%) se dit favorable à sa mise en place, soit presque autant que les chefs d’entreprise (49%). Le contrat de travail unique ou l’autorisation du travail le dimanche sont jugés efficaces pour relancer l’économie par une nette majorité de salariés (62%, soit un niveau plus élevé que chez les chefs d’entreprise) et plus d’un salarié sur trois souhaite que ces mesures soient mises en place.

En revanche, d’autres pistes testées dans l’enquête suscitent une levée de bouclier chez les salariés du privé. La suppression des 35 heures, l’assouplissement des règles du licenciement et le report de l’âge de la retraite à 65 ans ne sont pas perçus par une majorité de salariés comme des mesures efficaces pour relancer l’activité. Surtout, une très large majorité d’entre eux (entre 75% et 87%) ne souhaite pas que de telles mesures soient adoptées. Si les salariés du privé font preuve d’ouverture sur certains sujets, ils restent toutefois très attachés aux symboles du modèle social français : 35 heures, retraite et sécurité de l’emploi.

Présidentielle de 2017 : aucun candidat ne trouve grâce aux yeux d’un tiers des acteurs du monde économique

En fin de questionnaire, les interviewés ont été invités à dire quel est selon eux le candidat à l’élection présidentielle, déclaré ou potentiel, le plus crédible pour relancer la croissance et l’emploi dans le pays, une question ouverte, posée sans qu’aucune réponse n’ait été suggérée de façon à recueillir des citations spontanées. Plusieurs grands enseignements se dégagent des résultats obtenus.

Premier constat : aucun candidat ne trouve grâce aux yeux d’une partie importante des personnes interrogées : 32% des chefs d’entreprise et 30% des salariés. Certes au moment où les interviews ont été réalisées l’offre politique n’était pas encore totalement connue, il n’en demeure pas moins qu’à quatre mois de l’échéance présidentielle aucun leader politique ne semble convaincre une partie des acteurs du monde de l’entreprise dans le domaine de l’économie, de la croissance et de l’emploi, alors même qu’il s’agit d’une des principales préoccupations de l’opinion.

Deuxième constat : c’est François Fillon qui est jugé le plus convaincant par les chefs d’entreprise (40%) pour relancer la croissance et l’emploi, loin devant Emmanuel Macron qui totalise 8% de citations seulement. Le contexte a très certainement favorisé le candidat de la droite : les interviews ont eu lieu quelques semaines après sa victoire à la primaire. Aucun candidat de gauche n’est cité par les dirigeants d’entreprise.

Troisième constat : les salariés sont beaucoup plus partagés. François Fillon arrive en tête, mais avec seulement 14% de citations. Il est talonné par Emmanuel Macron (11%) et Marine Le Pen (10% de citations). Les candidats de gauche sont jugés moins convaincants (Jean-Luc Mélenchon 5%, Manuel Valls 4%, Arnaud Montebourg 2%). Les salariés du privé semblent plus disponibles pour modifier leur choix au fil de la campagne.

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  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Vincent Dusseaux Directeur d'études, Ipsos Loyalty

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