La France en tête des pays en attente d’un leader « fort » pour « casser les règles »

Alors que de plus en plus de leaders populistes, en Europe et dans le monde, accèdent au pouvoir, Ipsos dévoile les résultats de son étude annuelle Global Advisor sur le populisme et le nativisme. Attrait pour un pouvoir qui casse les codes, volonté d’une parole dirigeante libérée du « politiquement correct », situation économique dégradée, thème de l’immigration… Ipsos décrypte tous les ingrédients du populisme, et révèle que près d’un Français sur deux (46%) pense que le système actuel ne fonctionne plus. A bientôt un an des prémisses du mouvement des Gilets Jaunes, l’étude apporte un nouvel éclairage sur la crise de la représentation qui anime la France depuis de nombreux mois.
Chiffres et enseignements clés de l’étude :
46% des Français pensent que « le système » ne fonctionne pas – versus 54% dans le monde
73% des Français pensent que la situation économique est « truquée » en faveur des riches et des élites – versus 70% dans le monde
Trois Français sur quatre (75%) estiment que les partis traditionnels et les politiciens ne se soucient pas d’eux
Plus d’un Français sur deux (60%) voit les migrants comme une menace, et pense que les accueillir n’améliorera pas la situation du pays
45% des Français pensent que l’arrivée de migrants prive les Français natifs de services sociaux

Une situation économique intentionnellement « truquée » ?

Où en est-on du populisme en France en 2019 ? La nouvelle édition de l’étude Ipsos Global Advisor met en lumière un système qui ne convainc plus les Français : ils sont en effet 73% à estimer que l’économie est « truquée » en faveur des riches et des élites, un chiffre en croissance de 3 points par rapport à 2016.

Plus globalement, 46% des Français pensent que le système ne fonctionne plus, un chiffre toutefois en baisse par rapport à 2016, où plus d’un Français sur deux (52%) partageait cette opinion.

« Etrangement, la France n’est pas le pays le plus négatif sur la question du « système », alors même que la contestation des Gilets Jaunes a montré et radicalisé le sentiment de déclassement et l’impression de n’être ni représentés ni compris », analyse Yves Bardon, Directeur du programme Flair, Ipsos Knowledge Center.

A l’échelle mondiale, l’impression d’un système défaillant est partagée par 54% des personnes interrogées, avec des pics en Europe de l’Est (84% en Pologne) ou en Amérique Latine (78% au Brésil).

Ce constat s’accompagne d’une crise de la représentation : en France, 3 Français sur 4 (75%) déclarent avoir l’impression que les partis traditionnels et les politiciens ne se soucient pas des gens comme eux, ou encore ne les comprennent pas (72% des Français, soit +10 points par rapport à la moyenne mondiale). Une tendance qui a augmenté structurellement ces dernières années partout dans le monde (66% de l’opinion mondiale partage cette impression, vs. 64% en 2016).

Le désir d’autoritarisme reste fort en France

Pour répondre à une représentativité vue comme défaillante, 77% des Français perçoivent l’arrivée d’un leader fort, capable de casser les règles, comme une solution pour améliorer la situation du pays. Un chiffre bien au-dessus de l’opinion mondiale (49%), plaçant l’hexagone en tête des pays les plus prononcés sur cette question. Par ailleurs, seuls 4% des Français émettent un fort désaccord avec cette idée.

65% des Français sont également convaincus qu’un tel responsable politique permettrait d’inverser la tendance et de reprendre le pays des mains des riches et des puissants, un chiffre toutefois en baisse de 5 points par rapport à 2016.

« L’affirmation que les élites ont trahi le peuple, que le temps de reprendre directement le pouvoir est venu, que le système est cassé, que passer par des « représentants » ne fonctionne pas et qu’il faut en changer… Sont des éléments constitutifs du populisme. Cela explique l’émergence de personnalités hors « establishment », pour porter une parole directe, cash, libérée du politiquement correct et charismatique : Trump, Salvini, Bolsonaro, Johnson, Orban… chacun incarne ce leadership décomplexé qui déstabilise les représentations traditionnelles tout en étant supposé populaire. « A quelques mois de l’entrée dans une nouvelle séquence électorale, il ne sera pas inutile de garder à l’esprit les alertes que représentent nos résultats sur le fonctionnement et la perception de la démocratie.» explique Yves Bardon.

Des Français méfiants sur la question migratoire

Dernière brique du populisme : le nativisme, et l’immigration, qui reste associée à une menace. Ainsi, plus d’un Français sur deux (65%) pense qu’accueillir les migrants n’améliorera pas la situation du pays. Par ailleurs, 45% des Français estiment que l’arrivée de migrants prive les Français de services sociaux, une croyance qui a toutefois tendance à reculer en France (vs. 49% en 2016).

Enfin, l’idée que les Français devraient être prioritaires dans l’attribution d’un emploi a progressé en France sur les trois dernières années : elle en convainc 54%, en augmentation de 3 points depuis 2016.

Fiche technique : étude conduite du 22 mars au 5 avril 2019 dans 27 pays, 18,528 personnes interrogées : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie Saoudite, Argentine, Australie, Belgique, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, Etats-Unis, Espagne, France, Hongrie, Inde, Israël, Italie, Malaisie, Mexique, Pérou, Pologne, Royaume-Uni, Russie, Serbie, Suède, Turquie, * échantillon supérieur à 1,000 personnes en Australie, Brésil, Canada, France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Japon, Espagne et Etats-Unis. 500 personnes ont été interrogées dans chacun des autres pays de Global @dvisor.

 

Auteur(s)

  • Yves Bardon
    Yves Bardon
    Directeur du programme Flair, Ipsos Knowledge Centre

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