La culture de l'alerte face aux risques : le regard des Français

Le rapport « La culture de l’alerte », produit par Ipsos pour l'AFPCNT, Avignon Université et la Fondation pour la Recherche de la MAIF, dresse un état des lieux des connaissances et des attentes des Français concernant les systèmes d'alerte en cas de risques. Si la connaissance des dispositifs d’alerte est globalement bonne, une méconnaissance des risques naturels, technologiques et de sécurité publique est observée. L'étude se penche également sur l'efficacité du système FR-Alert, son utilisation et les attentes de la population en matière d'alerte et de prévention.

Auteur(s)
  • Alice Tétaz Directrice de clientèle, Public Affairs
  • Salomé Quétier-Parent Directrice d'études, Public Affairs
  • Felix Tentillier Chargé d'études senior, Public Affairs
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Les chiffres clés à retenir

  • 76% des Français sont insuffisamment informés sur au moins un type de risque (naturel, technologique ou de sécurité publique).
  • 42% des Français affirment n’être pas assez informés sur les risques naturels (inondation, feu de forêt, séisme,…)
  • 96% des Français connaissent au moins un dispositif d’alerte à la population.
  • 48% des Français ont déjà entendu parler de FR-Alert, mais seulement 22% savent précisément ce que c'est.
  • 80% des Français souhaitent recevoir davantage d’informations sur les alertes et le système FR-Alert.
  • 24% des Français ont reçu au moins une alerte réelle et 32% une alerte dans le cadre d’un exercice.
  • 81% des Français préfèrent la prévention à la réaction : être prévenu le plus tôt possible en cas de risque, même si le danger ne les atteint finalement pas

Les Français affichent une méconnaissance préoccupante des différents types de risques

Interrogés sur les connaissances dont ils disposent sur des dangers de nature différente (risques naturels, risques technologiques ou menaces de de sécurité publique), de nombreux Français reconnaissent être insuffisamment informés :

  • Seule une courte majorité de la population se dit assez informée sur les risques naturels (inondation, feu de forêt, séisme, mouvement de terrain, tempête, cyclone, avalanche, éruption volcanique, tsunami…) (58%). 10% se disent « tout à fait » assez informés sur le sujet.
  • Un tiers des Français se dit suffisamment informé sur les risques technologiques (accident industriel, incident nucléaire, transport de matières dangereuses, rupture de barrage…) (33%). Seuls 6% le sont « tout à fait ».
  • Enfin, 46% jugent être suffisamment informés à propos des menaces de sécurité publique (intrusion, attentat…) et seulement 9% « tout à fait ».

En fin de compte, plus de 3 Français sur 4 sont, de leur propre aveu, insuffisamment informés sur au moins l'un de ces dangers (76%) et un tiers se dit mal informé sur la totalité d’entre eux (33%).

 

Dans les DROM, le niveau d’information sur les risques technologiques est particulièrement faible (18% s’estiment insuffisamment informés à ce sujet), et celui sur les risques naturels très inégal (69% en Guadeloupe et en Martinique, 67% à la Réunion, 40% à Mayotte et 35% en Guyane).

Seuls 79% des Français déclarent avoir déjà reçu des informations, même parcellaires, sur ces risques et ils se sont le plus souvent appuyés sur un seul type de source. 43% des Français en ont entendu parler dans les médias, ce qui en fait la principale source d’information sur le sujet, 27% ont fait la démarche de se renseigner par leur propres moyens et 20% ont été informés lors de campagnes de sensibilisation (par les pouvoirs publics ou des associations). Sont également citées comme sources les communes (14%), l’environnement professionnel (13%), l’école des enfants (11%) et les acteurs référents lors de l’achat ou de la location d’un bien (8%).

 

Une bonne connaissance générale des dispositifs d'alerte

La culture du risque, qui apparaît encore insuffisamment développée et ancrée en France, doit être distinguée de la culture de l’alerte, qui englobe en particulier la connaissance des dispositifs d’alerte à la population à disposition des pouvoirs publics.

Actuellement, la quasi-totalité des Français affirme avoir connaissance d’au moins un dispositif d’alerte à la population (96%) : 91% ont entendu parler des sirènes d’alerte ; 88% ont entendu parler des SMS d’alerte ; 77% ont entendu parler des notifications sonores ; 74% des haut-parleurs et enfin 70% des mégaphones.  Dans l’ensemble, les Français en ont pris connaissance dans les médias (58%) plutôt que par des sources officielles (37%).

 

FR-Alert : une notoriété encore limitée

Le système FR-Alert, qui permet l’envoi de notifications sonores (s’affichant sur les écrans des téléphones) depuis juin 2022, et l’envoi de SMS géolocalisés depuis décembre 2023, dispose d’une notoriété encore contrastée. 48% des Français en ont déjà entendu parler mais seulement 22% voient précisément ce dont il s’agit. Ceux qui le connaissent en ont principalement entendu parler via les médias (56% d’entre eux) ; 26% en ont entendu parler par les pouvoirs publics et 20% directement par la réception d’alerte(s).


Si près de 8 Français sur 10 se sentent capables d’agir seuls à réception d’un message d’alerte (79%), seule une courte majorité estime que tous ses proches en seraient capables eux aussi (58%). Pour une population mieux préparée et des alertes efficaces, les Français sont favorables au développement des exercices d’alerte auprès des enfants et du grand public (90% et 84%). Plus largement, ils souhaitent recevoir davantage d’informations au sujet des alertes (80%) et du système FR-Alert (80%). 

Près d’un Français sur quatre a reçu au moins une alerte réelle et près d’un tiers une alerte dans le cadre d’un exercice

Au total, 24% des Français déclarent avoir reçu au moins une alerte réelle et 32% une alerte dans le cadre d’un exercice (45% au moins une des deux[1]).

Les alertes réelles ont en très grande partie été reçues sur les téléphones (17% déclarent en avoir reçu sous la forme de SMS et 9% par notifications sonores), et assez peu par des sirènes, hauts parleurs et mégaphones (5%, 3% et 2%). Les Bretons sont parmi ceux qui déclarent le plus avoir reçu une alerte réelle (39%, le plus souvent liées à des tempêtes, ce qui fait écho au passage de la tempête Xynthia et au cours de laquelle 6 notifications sonores avaient été envoyés les 1 et 2 novembre 2023), avec les Réunionnais (77%, le plus souvent liée à un cyclone et dans une moindre mesure, au risque d’éruption volcanique du Piton de la fournaise, avec un lien là aussi avec des événements réels, 6 notifications sonores ayant été envoyés depuis juin 2022 face à ce deux types de dangers).

Les alertes reçues dans le cadre d’exercices l’ont été par des sources plus diversifiées (sirènes : 15%, SMS : 14%, notifications : 13%, haut-parleurs : 8% et mégaphones 5%). 

Dans l’ensemble, ceux qui ont reçu des alertes réelles et/ou dans le cadre d’exercices déclarent qu’elles étaient essentiellement associées à des pluies ou des orages (37%), des tempêtes (26%) et des inondations (16%).

Des retours globalement positifs sur les alertes reçues

La perception de l’alerte reçue (clarté, ciblage, pertinence de l’alerte) diffère assez peu selon qu’il s’agisse d’une alerte réelle ou d’exercice. Une grande majorité des personnes ayant reçu une alerte réelle l’ont perçue comme « claire » : 89% (85% pour les exercices). Pour 85% d’entre eux, celle-ci était justifiée (85% également pour les exercices). Enfin, 83% se sont sentis ciblés à bon escient (80% pour les exercices).

Les jeunes âgés de moins de 35 ans affichent des retours un peu plus critiques que leurs aînés, mais ceux-ci restent majoritairement positifs quel que soit le profil observé.

Rapidité de diffusion et clarté des informations au cœur des attentes des Français

L’efficacité d’une alerte est d’abord jugée sur sa rapidité de diffusion (65% citent cet aspect parmi les trois principaux caractérisant l’efficacité d’une alerte), puis sur la présence d’instructions claires à entreprendre (59%). Viennent ensuite les détails sur la nature du danger (48%) et la localisation des zones touchées (43%). La rapidité est donc un critère essentiel, ce qui renvoie à la fois à l’aspect technique (les notifications sonores sont diffusées en 1 à 2 secondes, quel que soit le nombre de personnes à l’alerte) et à la rapidité de la prise de décision des autorités.

Enfin, les Français expriment leur souhait de recevoir un contenu qui priorise et informe sur l’action immédiate à entreprendre, avant les éléments contextuels de l’alerte. Parmi les informations qui peuvent être renseignées dans un message d’alerte, celle qui est jugée « essentielle » par le plus grand nombre est la description de « ce qu’il faut faire » (74%), suivi des endroits « où se mettre à l’abri » (71%). Les autres informations étant jugées les plus « essentielles » sont le lieu précis de l’événement (65%), le type d’évènement (64%) et ce qu’il ne faut pas faire (59%). Cela rejoint les préconisations de la littérature scientifique, les négations (ce qu’il ne faut pas faire) étant d’ailleurs déconseillé car pouvant être contre-productives.

Prévenir en amont sans paniquer : le dilemme des Français face aux alertes

Une large majorité de Français préfère être prévenue le plus tôt possible quand il y a un danger afin d’avoir le temps pour mettre en oeuvre les actions de prévention (81%), même si le danger ne les atteint finalement pas. De même, 92% souhaitent être prévenus dès qu’il y a un risque de dégât matériel ou environnemental (et pas forcément de risque humain).

Les Français sont majoritairement rassurés par la possibilité de recevoir des alertes sur leur téléphone (88%) et reconnaissent que « ce système peut sauver des vies » (93%). Cependant, ils sont également conscients de ses limites : bien que la plupart souhaitent recevoir ces alertes, 41% des Français trouvent anormal de les recevoir sans accord préalable. Enfin, 71% craignent que les notifications sonores puissent provoquer des phénomènes de panique (ce qui est avéré à l’échelle individuelle mais source de débats à une échelle collective) et 55% pensent qu'elles risquent de passer inaperçues dans le flux d'informations. 

Rapport complet


A propos de cette enquête

Enquête Ipsos pour l'AFPCNT, Avignon Université et la Fondation pour la Recherche de la MAIF menée du 8 au 18 octobre 2024 auprès de 3197 personnes constituant un échantillon représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus :

  • Minimum 200 personnes dans chacune des 12 régions administratives françaises
  • Minimum 120 personnes en Corse et dans chacun des DROM (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, Réunion)

A noter : cette enquête a été menée avant que l’actualité ne soient marquée par différentes catastrophes naturelles, que ce soit les inondations survenues en Ardèche et dans la Loire (17 octobre 2024), dans le Var (27 octobre 2024), ou les inondations du 29 octobre survenues en Espagne dans la région de Valence. Cette enquête récolte donc une opinion des Français « à froid » sur le sujet et constitue un état initial des connaissances inédit sur ce sujet

Notes

[1] Sans compter les tests mensuels de sirènes (que 27% des Français déclarent avoir déjà entendu)

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  • Salomé Quétier-Parent Directrice d'études, Public Affairs
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