La relation à l’autre et aux minorités en France : des Français qui se crispent, des enseignants qui s’inquiètent

Pour la troisième année consécutive, la Fondation du Judaïsme Français a commandé à Ipsos une étude visant à mieux comprendre les dynamiques de la relation à « l’autre » et aux minorités au sein de la société française. Cette année, la Fondation a aussi souhaité interroger un échantillon d’enseignants du secondaire, afin de mieux comprendre ce que ces observateurs privilégiés de la jeune génération constatent au sein des établissements scolaires.

Auteur(s)
  • Brice Teinturier Directeur Général Délégué France, Ipsos (@BriceTeinturier)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Mathieu Gallard Directeur d'Études, Public Affairs
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Grand public : une hostilité envers les musulmans qui progresse, et des préjugés à l’encontre des juifs qui restent prégnants

Alors qu’entre 2014 et 2016, les tensions identitaires n’avaient pas nettement progressé en France malgré le contexte très tendu d’attaques terroristes, on constate dans cette vague une progression des crispations au sein de la société, notamment à l’encontre de l’immigration de manière générale, et des musulmans en particulier. Même si, dans la vie quotidienne, les rapports avec les musulmans sont généralement sereins, les manifestations visibles de cette religion dans l’espace public et les projets d’« accommodements » avec la laïcité suscitent de plus en plus d’inquiétudes voire d’exaspération. Incontestablement, les attentats islamistes des dernières années ont fini par impacter l’opinion, d’autant plus que les discours politiques autour de « l’union nationale », qui avaient empêché la montée des sentiments anti-musulmans en 2015-2016, sont désormais nettement moins présents.

Les autres minorités sont assez peu affectées par ce climat anxiogène, même si certaines font l’objet d’un réel rejet, au premier rang desquelles on compte les Roms. Ainsi, si les préjugés anti-juifs restent très répandus au sein de la population française (plus d’un Français sur quatre en partage de nombreux), ils ne progressent pas sensiblement depuis 2014, et sont contrebalancés par le sentiment que les juifs sont particulièrement bien intégrés en France. On constate parallèlement une empathie accrue des Français vis-à-vis de leurs compatriotes juifs, la série d’attentats depuis 2015 ayant mieux fait comprendre à certains la précarité de la situation de cette minorité. 

Cette année, la Fondation du Judaïsme Français a par ailleurs souhaité investiguer la perception que le grand public a d’Israël et de son Gouvernement, dans le contexte de débats autour de la montée d’un « nouvel antisémitisme » lié à l’antisionisme. Cette image est certes globalement assez mauvaise, mais on constate que les Français se montrent prudents et modérés vis-à-vis du conflit israélo-palestinien, renvoyant les adversaires dos-à-dos. Si l’électorat de la gauche radicale est de loin le plus hostile à l’Etat hébreu, on constate en revanche qu’il se montre globalement moins perméable aux préjugés anti-juifs que la moyenne de la population, un constat qui bat en brèche certaines analyses. En revanche, ce sont les sympathisants FN qui restent les plus enclins à partager à la fois hostilité aux juifs et à Israël.

Enseignants : une situation perçue comme très difficile pour les élèves issus de minorités religieuses, ethniques ou sexuelle

Le niveau de diffusion d’opinions discriminatoires chez les élèves est désormais élevé, particulièrement dans les établissements situés en zone sensible où le sexisme, la misogynie et l’homophobie, mais aussi le racisme, la radicalisation religieuse, le prosélytisme et l’antisémitisme sont fréquemment perçus comme répandus par les enseignants. Plus préoccupant encore, on relève qu’au sein des établissements implantés en zone sensible, la quasi-totalité de ces comportements sont considérés comme étant en progression. C’est particulièrement le cas pour les phénomènes de radicalisation religieuse, de prosélytisme religieux, pour le sexisme et la misogynie, le racisme ou encore pour l’homophobie.

Si l’antisémitisme ne semble pas particulièrement progresser dans ces établissements difficiles, la montée très forte des phénomènes de radicalisation religieuse et de prosélytisme nourrit de fortes craintes pour les élèves juifs scolarisés. D’autant plus que de l’avis des enseignants, les préjugés vis-à-vis des Juifs, et notamment ceux ayant trait à l’argent, y sont largement répandus au sein des élèves.


L’évolution de la relation à l’autre au sein de la société française

Les élèves et la relation à l’autre en collège et lycée :
la situation vue par les enseignants

Auteur(s)
  • Brice Teinturier Directeur Général Délégué France, Ipsos (@BriceTeinturier)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Mathieu Gallard Directeur d'Études, Public Affairs

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