L'été des Français - Episode 4 : Quoi de plus festif qu'un apéritif ?

Ipsos lance la saga "L'été des Français" avec la communauté Ipsos ConnectLive, rassemblant 1 500 Français. Chaque semaine, les participants seront interrogés sur un thème spécifique et invités à partager leurs points vue. Dans ce nouvel épisode, nous avons demandé aux membres de notre communauté de nous décrire ce qu'était pour eux un apéritif réussi. Pastis ou Spritz ? Tarama ou caviar d'aubergine ? Saucisson ou plateau de légumes ? Découvrez l'avis de nos participants !

L’apéro, c’est sacré ! 

Si l’on s’amuse à chercher « Apéritif » sur Google, on arrive en moins d’une seconde à 62 400 000 sites susceptibles de donner des idées de produits, de recettes, de décoration, d’art de la table, d’achats de barbecue, de chapeaux de paille, ou de bougies anti-moustiques, etc., la liste semblant infinie. Parmi les rituels nés lors de la première quarantaine en 2020, ce n’est pas par hasard si l’apéritif à distance incarnait l’une des stratégies-réflexes pour garder le lien avec ses proches : « C'est lors du premier confinement que l'on a commencé avec la famille, mais aussi les potes de longue date, à communiquer par visio. On connaissait, bien sûr, mais on n'en avait pas réellement besoin avant, car on se voyait tous à intervalles réguliers. Là, dans le doute, cette nouvelle pratique s'est instaurée, et a perduré avec moi essentiellement (deux fois covid et sujet à risque) ». 

Les participants de notre communauté online ConnectILive nous aident à comprendre ce que représente l’apéritif et pourquoi il est aussi populaire, plus de 89% des Français disant en organiser régulièrement, 40% le prenant deux fois par semaine : « L'apéro est un rituel. Le samedi, un petit verre de muscat avec des gressins ; le dimanche midi, un petit verre de Porto avec des radis ». 

Alors, qu’est-ce qu’un apéritif réussi ? 

Avant tout, une pause et une soupape qui permettent de décompresser, de se détendre, de discuter sans contrainte, sans caractère formel, par exemple celui d’une situation professionnelle ou d’un dîner assis classique : « L’apéritif, c’est rire et discuter de ce qu'on aime faire et grignoter de bonnes choses, voir des nouveautés ». Moment d’échanges et de liberté, l’apéritif retrouve les plaisirs de la conversation, quand l’on passe d’un sujet à l’autre avec légèreté, « sans se prendre la tête ». De ce point de vue l’apéritif rappelle que la conversation est l’art de « voltiger de propos en autres, comme des abeilles qui rencontreraient en leur chemin diverses sortes de fleurs », pour citer Madame de Staël, et relève d’un pur divertissement où rien de fâcheux ne doit être abordé, le risque du sérieux et de la dispute n’étant jamais loin, comme l’écrivait au XVIIIème siècle Pierre-Charles Roy dans le seul vers qui reste de son œuvre à propos des patineurs : « Sur un mince cristal l’hiver conduit leurs pas / Le précipice est sous la glace / Telle est de nos plaisirs la légère surface / Glissez, mortels, n’appuyez pas ». 

Pour être sûr de faire rater l’apéritif, il suffit de mettre sur la table des sujets politiques, électoraux, religieux, la gestion sanitaire de la covid-19, la guerre en Ukraine, l’inflation et les impôts, la question des préférences sexuelles, des engagements végétariens ou vegan. Ce sont les sujets « tabous », ou que l’on ne peut aborder qu’avec des gens que l’on connaît bien, et avec modération. Les questions personnelles peuvent aussi très vite déraper dans le conflit ou des émotions ingérables : « Si un couple présent lors de l'apéro est en situation de séparation ou infidélité, on n'en parle pas. On n’amorce jamais le sujet d’un drame récent dans la vie d'un convive (mort d'un proche, perte de travail), on attend qu’il nous en parle d'abord ». On n’oubliera pas les mauvaises surprises quand on (re)voit des gens que l’on n’apprécie pas, avec lesquels il n’y aucun atome crochu, ou quand des convives ivres perdent leur self-contrôle et troublent l’ambiance. 

Le butinage intellectuel (parler « des films ou des livres que l’on aime, de la scolarité des enfants, des projets, des futurs achats, des potins, de la météo, de la chaleur, etc. ») s’accompagne d’un papillonage gourmand, a priori sous le signe de l’abondance. A l’inverse du dîner, dont le menu est composé et suit un ordre, l’on peut grignoter ce que l’on veut, mélanger à la fois sucré et salé, fromage et saucisson, olives et guacamole, tarama et pâté de foie, etc. Tous les participants notent un marché de plus en plus diversifié, avec de nouvelles recettes, des produits exotiques, des formats pratiques (pains surprises, toasts, etc., surgelés ou pas) qui offrent de multiples possibilités et de plus en plus de choix pour satisfaire les envies de chacun : « On a bu du vin moelleux et de la bière, chacun ses goûts ! On a mangé du saumon fumé, du pain toasté, des blinis avec des tartinables et de la salade ». Cette variété n’interdit pas le militantisme : « Nous avons partagé des bières artisanales, des produits bio et locaux de producteurs que nous soutenons : fromages de brebis, de chèvre, de vache, saucisson, chips de sarrasin, tomates cerises, pesto d'algues… ».  

Dans la logique du butinage, l’une des caractéristiques de l’apéritif est son caractère ludique organisé autour de la miniaturisation de recettes traditionnelles (quiches, pizzas, saucisses, toasts, pâtés en croûte…) qui, en les transformant en bouchées, permet de se passer des traditionnels couverts au profit de piques ou de cuillères comestibles, ou des doigts seuls, d’où une dimension régressive qui fait écho à une dînette pour adulte, plus ou moins sophistiquée en fonction de la nature des produits (de saison, saumon, foie gras, chips, cubitainer ou vins fins, etc.). 

On comprend mieux le succès de l’apéro-dînatoire qui permet d’échapper au formalisme qui s’installe quand on passe à table avec des convives placés et statiques, et qui favorise au contraire le mouvement, la spontanéité, les échanges et les… rencontres, voire la désinhibition, parce qu’il s’agit de se faire plaisir : « Nous avons bu des Cosmo (vodka triple, canneberge, citron), des bières aromatisée fruit, et du vin rouge ». C’est l’un des non-dits de l’apéritif, le libertinage et la séduction retrouvée, d’où un arbitrage récurrent : l’apéritif précédant le déjeuner ou le dîner pour la famille, l’apéro-dînatoire pour les amis.  
Avec les boissons alcoolisées, la musique joue un rôle essentiel dans la construction de cette atmosphère détendue et fluide : « Un apéro réussi, c'est quand on est avec les personnes qu'on apprécie tout simplement, une bonne ambiance, de la musique douce et des douceurs à partager ». Elle participe d’un certain lâcher-prise que l’on n’imagine pas dans le classicisme du dîner, ouvre sur d’autres émotions, et crée les conditions pour se détendre, s’amuser, éventuellement danser (le karaoké n’est pas encore entré dans les mœurs en France, en tout cas chez soi). 

L’apéritif a tout pour rester une parenthèse enchantée et une exception française incontournable, ou pour le dire autrement en concluant avec l’un des participants de ConnectLive : « Un apéro réussi, c'est lorsque je prends un apéro et un apéro raté, c'est lorsque je ne prends pas d'apéro ». 


Retrouvez tous les épisodes de
notre saga de l'été

Episode 1 - L'hôtel grand absent des vacances

Episode 2 - L'éveil des désirs secrets

Episode 3 - Rêver ses vacances ou vivre les vacances de ses rêves.

Episode 4 - Quoi de plus festif qu'un apéritif ?.

Episode 5 - Sobriété énergétique : l'overdose des Français ?.


Les prénoms des personnes citées ont été modifiés.

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