Améliorer l'image des producteurs de céréales
Lors de Défi Blé, rencontre internationale des producteurs de blé et de céréales qui s'est déroulée à Paris en octobre dernier, Florence Gramond, directrice d'Ipsos Agri Food, a exposé les résultats d'une enquête sur la perception des céréaliers par les citadins. A l'occasion du salon de l'agriculture, Ipsos.fr reprend l'interview accordée à l'Association Générale des Producteurs de Blé (AGPB) : si les céréaliers ont aujourd'hui mauvaise presse, ce n'est pas une fatalité.
Comment les citadins perçoivent-ils les producteurs de céréales, notamment par rapport aux autres agriculteurs ?
Quelques mots d'abord pour rappeler que notre enquête a été réalisée sous forme de tables rondes. Les participants n'avaient pas de proche parenté avec des agriculteurs, ni de résidence secondaire en zone agricole. Nous les avons d'abord interrogés sur ce qu'ils savaient de vous, sur leur manière de vous voir. Puis des producteurs sont venus dialoguer avec eux. Il s'agissait avec ce second temps d'apprécier comment peut évoluer l'image première que les citadins se font de vous.
Spontanément, les citadins ont plus de mal à se représenter le métier de céréalier que les métiers d'éleveur, de viticulteur, de maraîcher etc. Le fait que les céréales apparaissent plus que les autres produits agricoles comme des matières premières alimente ce phénomène. Quant à l'exploitation céréalière, elle est perçue différemment des autres. Au-delà de son importante superficie et de ses "grosses machines", il lui est attribué plus de salariés et un recours supérieur aux technologies modernes. Cette perception nourrit la vision d'une certaine richesse, entretenue -dans l'esprit du public - par les subventions.
Les céréaliers eux-mêmes, enfin, sont perçus comme plus éloignés du reste de la population que les autres agriculteurs. L'isolement des fermes au milieu des champs, le fait de voir d'abord la machine avant l'homme y contribuent. Mais, également, les céréaliers sont considérés comme une communauté peu soucieuse de se mélanger avec les autres.
Toutes ces images spontanées alimentent de fait et malheureusement divers préjugés - richesse, productivisme - vis-à-vis de vous.
Est-il apparu des éléments sur lesquels s'appuyer pour faire évoluer cette perception ?
Plus que de votre contribution à l'emploi et au commerce extérieur, reconnue par tous, vous disposez de deux facteurs favorables. D'une part, nos concitoyens vous désignent comme les agriculteurs qui participent le plus à la fonction d'entretien, gestion et aménagement des paysages. D'autre part, ils ont réellement envie de mieux vous connaître sur le plan humain et professionnel. A cet égard, il a été édifiant de voir ce qui s'est passé lors des tables rondes après l'arrivée en salle des producteurs. Ces derniers ont employé un langage simple, détendu, concret. Très rapidement les pesticides ont été regardés comme des produits indispensables à la protection des cultures, la taille des exploitations a été jugée normale et le montant des subventions logique, voire insuffisant, au regard des baisses de prix.
Quels conseils donneriez-vous au milieu céréalier en termes de communication ?
Plus il y aura d'intermédiaires entre les agriculteurs et le grand public, moins le discours sera pertinent, surtout s'il y a au départ de lourds préjugés. Il faut au contraire restaurer le contact, inviter l'autre à venir vers soi, aller vers lui. Les agriculteurs sont les mieux placés pour communiquer sur leur métier avec les autres citoyens, pour s'exprimer sur leur quotidien.
Il devient alors possible de réconcilier grand public et modernité de l'agriculture. Les gens comprennent vite qu'avoir une moissonneuse-batteuse de grande puissance est important, compte tenu des surfaces nécessaires vu le prix des céréales et que les méthodes de travail intègrent la préservation de l'environnement. Les préjugés sont alors rapidement évacués.