La Rochelle : lutte fratricide à gauche

L'enquête Ipsos/Steria réalisée à la Rochelle pour France 3 Poitou Charentes, France Bleu La Rochelle et Sud Ouest montre que la gauche, qui totalise près de 70% des intentions de vote premier tour, devrait conserver sans problème une ville qu'elle dirige depuis 1971. Comme en 2008 et 2001 la droite parlementaire ne convainc pour l'instant qu'un électeur sur quatre, avec la liste UMP-UDI conduite par Dominique Morvant créditée de 19% d'intentions de vote et une liste centriste à 4%. Le FN recueille 7% d'intentions de vote et ne semble pas en mesure d'atteindre la barre des 10% nécessaires pour se maintenir au second tour.

Auteur(s)
  • Vincent Dusseaux Directeur d'études, Ipsos Loyalty
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L'élection devrait se jouer entre Anne-Laure Jaumouillié, vainqueure de la primaire socialiste qui conduit la liste PS-PC-Divers gauche, et Jean-François Fountaine, battu à la primaire mais qui se présente quand même à la tête d'une liste dissidente. Les deux listes sont au coude à coude dans les intentions de vote premier tour : 28% pour la liste Jaumouillié contre 26% pour la liste Fountaine.

Les deux listes ne s'appuient pas tout à fait sur le même électorat. Bien que la gauche soit très fragmentée à La Rochelle, avec la présence d'une liste Front de Gauche et d'une liste EELV en plus de l'extrême gauche, près de la moitié des sympathisants de gauche (47%) choisissent la liste Jaumouillié dès le premier tour, contre 27% pour la liste Fountaine. En revanche, la liste dissidente mord largement sur l'électorat de droite et recueille les intentions de vote de 25% des sympathisants UMP/UDI, ce qui n'est pas du tout le cas de la liste Jaumouillié.

Au second tour, la liste d'Anne-Laure Jaumouillié bénéficie du report de voix de la majorité des électeurs des listes Front de Gauche et EELV pour accentuer son avance : elle est créditée de 39% d'intentions de vote, contre 34% à la liste Fountaine et 27% à la liste UMP-UDI. Pour autant rien n'est joué. L'opposition entre les deux listes de gauche rappelle en fait la législative 2012, où Ségolène Royal, en tête au premier tour, avait finalement été largement battue par le dissident Olivier Falorni, qui obtenait 63% des suffrages au second tour, grâce à l’apport d’une partie des voix de droite. Il s’agissait alors dans une configuration de duel, et pas de triangulaire comme ce sera certainement le cas le 30 mars prochain. Pour autant, il n'est pas exclu qu'au vu des résultats du premier tour, une partie de l'électorat de Dominique Morvant, considérant que la victoire n'est pas possible, choisisse Jean-François Fountaine (qui présidait d'ailleurs le comité de soutien d'Olivier Falorni en 2012) pour tenter de faire battre la gauche "officielle".

Au final l'élection peut donc s'avérer beaucoup plus incertaine que cette enquête ne le laisse supposer. Anne-Laure Jaumouillié a pour elle la légitimité que lui confère sa victoire à la primaire socialiste et le soutien du maire sortant, d'autant plus précieux que les Rochellais le créditent d'un bon bilan (71% de satisfaction). Jean-François Fountaine bénéficie quant à lui d'une base électorale un peu plus large avec l'appui d'une partie non négligeable de l'électorat de droite, mais sans doute aussi plus fragile (38% de son électorat potentiel du premier tour se réserve le droit de changer d'avis, 62% déclarant leur choix "définitif", contre 22% encore indécis dans l'électorat d'Anne-Laure Jaumouillié, 78% de choix "définitif"). Le dissident n'est pas aujourd'hui favori, mais s'il arrivait en tête au soir du premier tour, la dynamique de campagne de l'entre-deux-tours pourrait lui permettre d'inverser le rapport de force. Dès lors, le niveau de mobilisation des électorats de chaque liste au premier tour sera décisif, et devrait constituer pour les deux candidats l'enjeu majeur de fin de campagne. Pour l'heure l'enquête mesure une mobilisation particulièrement faible avec une participation qui pourrait même tomber sous les 50%.

Auteur(s)
  • Vincent Dusseaux Directeur d'études, Ipsos Loyalty

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