Les électeurs ont privilégié une forme de continuité
Premier tour des législatives : Joachim Soëtard, directeur du développement d'Ipsos Public Affairs, analyse à chaud les résultats du Sondage Sortie des Urnes, pour 20minutes.fr.
Un retour marqué aux abstentionnistes des élections précédentes ?
On a battu le record d'abstention pour un premier tour de législatives sous la Vème République ; la participation au scrutin est en complet décrochage par rapport à l’élection présidentielle. Pour autant, les abstentionnistes de dimanche ont un profil relativement «traditionnel» : jeunes, notamment les 18-24 ans, ouvriers, personnes aux revenus modestes, qui ne se sont pas déplacés. L'absence de suspens, le manque d'enjeu en a découragé certains. D'autres électeurs ont pu estimer que le vote du 6 mai correspondait déjà à leurs attentes. La lassitude par rapport à un débat politique qui a commencé il y a longtemps, à l’automne pour le PS, a également joué.
La primauté du local très faible ?
Effectivement. Nous sommes dans un résultat typique d’une consultation locale qui intervient rapidement après une élection présidentielle. Les électeurs privilégient une forme de continuité et confortent leurs choix : la politique menée par Nicolas Sarkozy prime sur le choix local.
La gauche partie battue ?
Dans un certain sens oui, l’indice de mobilisation des électeurs proches de l'UMP (72%) est d'ailleurs plus important que celui des sympathisants socialistes (67%). Mais il ne serait pas exact de dire que les électeurs de gauche ont baissé les bras avant le vote ; on reste dans le prolongement d’une élection très porteuse. En revanche, la tentation abstentionniste a été nettement plus marquée dans l'électorat de François bayrou : 42% des proches du MoDem ne sont pas allés voter dimanche.
Le FN s’effondre, le PCF se maintient…
Le parti de Jean-Marie Le Pen s’effrite encore plus qu’il y a un mois. C’est une élection qui classiquement n’est pas favorable au FN car il perd son leader national. Mais surtout, Nicolas Sarkozy a réussi son opération de séduction auprès de l'électorat frontiste. Pour le PCF, l’enjeu n’est pas la voix, mais le député. Le mode de scrutin et la logique de "désistement républicain" lui permettra de conserver de 6 à 12 sièges à l'Assemblée Nationale, selon notre projection.
Et donc, dimanche prochain ?
Une nouvelle campagne va commencer, avec peu de triangulaires, des duels classiques UMP/PS et alliés. Une centaine de sièges est d'ores et déjà acquise à la majorité présidentielle, 200 autres devraient lui revenir presque mécaniquement. La gauche, le PS la plupart du temps, peut de son côté déjà compter sur 70 sièges. Il reste donc 200 sièges disputés, où l'écart entre gauche et droite est de quelques points. Si la majorité est acquise à la droite, l'ampleur de la victoire dépendra de la mobilisation de la gauche au second tour. Avec un léger sursaut, on pourrait se retrouver dimanche dans un rapport de force à l'Assemblée Nationale finalement pas très éloigné de celui de 2002.