La France est-elle un pays européen ? - Épisode 2 : un scepticisme grandissant

A l'approche des élections du 26 mai, un sondage Ipsos analyse la crédibilité des partis eurosceptiques, alors que le système européen actuel ne semble pas faire l'unanimité.
CONTEXTE
Il y a deux ans, à l’occasion des 60 ans de la signature du traité de Rome, Ipsos avait réalisé une étude dans 25 pays à travers le monde[1]. Elle montrait notamment que seuls 22 % des Français interrogés estimaient que l’Union européenne avait été davantage un succès qu’un échec, contre 40 % des Britanniques et des Polonais. Avec la Belgique, c’était le pays européen avec la vision la plus négative des actions de l’Union européenne, un résultat très médiocre pour l’un des six pays fondateurs de 1957.
 
En 2019, à quelques semaines des élections européennes, un nouveau sondage Ipsos [2] fait le point et les résultats sont peu brillants : 30% des Européens pensent que l'Union est un succès (-3%) ; les pays où les opinions sont les moins nombreuses à parler de succès sont la Belgique (19%), l’Italie (18%) et la France (17%).
L’étude aborde trois grandes catégories de sujets : la perception du projet européen pour les pays et leurs habitants, la crédibilité des partis eurosceptiques dans la perspective de l’élection du 26 Mai 2019, les grandes attentes et priorités à traiter par l’Union européenne.

Existe-t-il une alternative politique à l’offre des partis traditionnels qui – historiquement – ont fait l’Europe telle qu’elle est perçue ? Les eurosceptiques et les mouvements nationalistes ont-ils leurs chances ?

Remarquons d’abord que le système démocratique ne donne pas l’impression de fonctionner en Europe, et encore moins dans les pays eux-mêmes : 31% se déclarent insatisfaits en ce qui concerne l’Union dans son ensemble (contre 29%) et 44% en ce qui concerne leur pays d’origine (contre 26%).

Avec 47% d’insatisfaits, la France est dans les pays les plus critiques avec l’Espagne (46%), au même niveau que la Grande-Bretagne, mais derrière la Hongrie (62%).

Maintenant, quant à savoir si les mouvements anti-européens gagneront les élections et profitent de l’insatisfaction, les pronostics sont moins clairs : 23% des Européens les voient en tête, contre 24% ; 22% ne se positionnent pas et 31% déclarent ne pas savoir. Seuls les Italiens, avec 42%, croient dans la victoire des partis anti-européens ; à 18%, les Français figurent dans les plus sceptiques.

Le risque est le premier frein au vote : élire de nouveaux partis politiques prônant une volonté de changement radical représente en effet une menace pour 45% des Européens, dont 41% en Belgique, 39% en Allemagne et 37% en Pologne. A 33%, les Français sont aussi nombreux à le penser.

Les partis traditionnels ne doivent pas imaginer qu’ils représentent finalement la valeur sûre et le dernier recours : à peine 16% des Européens sont d’accord avec l’idée que les électeurs devraient s'en tenir aux partis politiques en place, alors que 35% sont négatifs envers les partis établis. Parmi eux, la Hongrie (49%), l'Italie (39%), la Belgique (39%) et la France (38%).

Si voter pour des partis eurosceptiques est un risque, et si voter pour les partis qui composent le paysage électoral classique ne donne pas envie, l’abstention incarne la solution la plus facile et la moins impliquante pour contester l’offre actuelle.

Entre crise de la représentation, doute sur la crédibilité des alternatives radicales, tentation du dégagisme, l’élection du 26 Mai 2019 interpelle le projet des fondateurs : élire le Parlement européen au suffrage universel. C’est en 1974, lors du Sommet de Paris que Valéry Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt, que la décision en avait été prise, avant d’être institutionnalisée en 1976 et mise en pratique en juin 1979.

Cinquante ans plus tard, que reste-t-il de ce projet démocratique ?

Découvrez notre dossier spécial Européennes


[1] Etude Global Advisor menée en ligne du 17 février au 3 mars 2017 auprès de 18 021 personnes âgées de 16 à 64 dans 25 pays.

[2] Etude Global Advisor spéciale Européennes 2019 menée en ligne du 22 mars au 5 avril 2019 auprès de 19 531 personnes dans 28 pays.

Auteur(s)

  • Yves Bardon
    Yves Bardon
    Directeur du programme Flair, Ipsos Knowledge Centre

Articles liés

  • Attentats de Paris | 13 novembre 2015 | Terrorisme
    Terrorisme Enquête

    10 ans après les attentats de Paris, les Français sont toujours inquiets du terrorisme

    Alors que la France s’apprête à commémorer les 10 ans des attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Dans le cadre du Baromètre Politique mené pour La Tribune Dimanche, une enquête Ipsos bva-CESI École d'ingénieurs fait le point sur l'état d'esprit des Français face à la menace terroriste.
  • Ipsos bva | Cote de popularité | Baromètre politique | Sondage
    Sondage Enquête

    Baromètre politique Ipsos bva-CESI École d'ingénieurs pour La Tribune Dimanche - Novembre 2025

    Préoccupations des Français, cotes de popularité de l'exécutif, du gouvernement et des leaders politiques Français, questions d'actualité... Retrouvez ici les derniers résultats de notre sondage d'opinion, le Baromètre Politique Ipsos bva-CESI École d'ingénieurs-La Tribune Dimanche.
  • Ipsos bva | Cosmétique Mag | Beauté | Cosmétiques | Parfum | Gen Z

    Beauté & parfum : la génération Z redéfinit les codes

    Les jeunes ne consomment plus la beauté comme leurs aînés. Pour la génération Z, la beauté et le parfum ne sont plus des accessoires de séduction, mais des langages identitaires. C’est ce que révèle l’étude Ipsos pour Cosmétique Mag, menée auprès d’un millier de jeunes français âgés de 18 à 25 ans. Derrière cette massification des pratiques, un constat fort : la fluidité ne supprime pas les différences. La génération Z brouille les codes sans les abolir, impose ses propres règles, et transforme la beauté en un terrain d’expression personnelle et culturelle. La beauté se dégenre, mais ne se dissout pas.