Vivre à Paris : réalités et aspirations
Vivre à Paris, réalités et aspirations
L'économie du temps
Le Paris des enfants
Le temps des enfants, quelles solutions
Composition des groupes - répartition des entretiens - guide d'animation
Vivre à Paris : réalités et aspirations
Le débat sur la gestion du temps parental s'appréhende d'abord dans un contexte plus large, celui de la vie dans une grande ville comme Paris. L'exigence de productivité, d'efficacité fixe le cadre social dont l'impact va s'étendre à l'ensemble des domaines de la vie en ville, y compris la relation parent/enfant. Comment dès lors appréhende-t-on ce contexte ? Le relation qu'entretient le Parisien avec sa ville est tout à la fois faite de contingences et d'attraits. L'espace parisien est bâti sur un système d'oppositions et de contraintes. Au monde, à la foule s'opposent l'anonymat, à l'activité le stress, à l'urbanisme l'aspiration - idéalisée - au " vert ", à l'individualisme le sentiment d'une unicité des comportements collectifs, qu'il s'agisse des comportements professionnels, économiques ou de loisirs. Ce système d'oppositions induit inéluctablement une politique faite d'arbitrages et de compromis, où l'individu touche du doigt des potentialités - culturelles notamment - qu'il n'atteint en fait que ponctuellement ou partiellement. La présence d'enfants au sein du foyer complexifie inéluctablement ces arbitrages. |
Un registre d'évocations spontanées qui fait une large part aux critiques quant à la qualité de vie
Les évocations spontanées relatives à la vie à Paris font état d'une perception souvent dure du milieu urbain. Les conditions socio-économiques (manque d'espace, coût de la vie), l'environnement (circulation, pollutions atmosphériques et sonores, propreté) ou encore l'insécurité (et notamment l'absence de " sanctuaires " où la violence n'aurait potentiellement pas prise) concourent à faire de Paris un univers difficile, où tout a un coût et pas nécessairement financier.
" Ca coûte cher de vivre dans une grande ville, surtout Paris " (Groupe 2, 9ème arrondissement).
Ces évocations socio-économiques se doublent de considérations liées aux infrastructures urbaines. La longueur des déplacements, l'éloignement des grands centres commerciaux ou des sites professionnels compliquent l'approche de l'espace urbain. Dans un tout autre registre, les administrations, entendues au sens large du terme (c'est à dire services publics stricto sensu mais aussi plus globalement les banques, les commerces) souffrent de l'inadaptation de leurs horaires, d'applications insuffisantes des Nouvelles Technologies de l'Information, d'une gestion déficiente des flux de public. Ces carences structurelles pèsent immanquablement sur la façon de vivre Paris aujourd'hui. Les services doivent dans l'idéal faciliter et rendre plus simples le quotidien contraint des Parisiens, mais ils ne jouent pas toujours leur rôle, accentuant même à l'inverse cette contrainte perçue ou vécue.
" Ca n'est pas seulement la file d'attente dans leur système à eux. Il n'y a pas de communication entre leurs systèmes d'un bureau A vers un bureau B. (…) Mais quand on dit l'administration il faut élargir, ça peut être du privé, les banques et autres. " (Groupe 2, 9ème arrondissement).
Enfin, autre chapitre au contenu déceptif, les Parisiens interrogés notent l'insuffisance des solidarités, sociales et familiales. Les réseaux relationnels traditionnels semblent aujourd'hui distendus (éloignement de la famille, méconnaissance du voisinage). Par ailleurs, les comportements sociaux semblent largement empreints d'uniformité. Les temps de vie sont ainsi considérés comme des temps d'abord collectifs, qu'il s'agisse des exigences professionnelles (se rendre ou revenir de son lieu de travail), des loisirs ou de la vie commerçante (notamment les besoins économiques et logistiques). Le temps collectif est en fait synonyme de contrainte, bien plus rarement signe du bonheur de vivre en communauté. Ce phénomène se traduit par une aspiration très nette à voir ces modes relationnels évoluer positivement.
" On fait toujours partie d'une vague de Parisiens. Tout le monde part en week-end à la même heure, ce qui fait que tout devient galère. " (Groupe 5, 15ème arrondissement, quartier André Citroën)." La queue au magasin c'est du temps perdu, mais c'est lié à la masse ça. " (Groupe 3, 12ème arrondissement).
Ce tableau assez volontiers critique est en partie " compensé " par l'image d'un Paris qui demeure pour tous le symbole parfait de la capitale culturelle et intellectuelle. L'offre dans ce domaine complète et modifie quelque peu l'image de la ville qui devient, par le truchement de ses infrastructures, la ville " des possibles ", notamment grâce à la qualité de l'offre, à sa diversité, mais aussi un maillage efficace des transports publics.
" On a tout ce qu'il faut à porter de main pour vivre bien. " (Groupe 6, 15ème arrondissement, quartier André Citroën)." J'ai le sentiment d'avoir cette liberté et pour moi c'est rassurant. " (Groupe 2, 9ème arrondissement).
Il est toutefois à noter que seul un petit nombre des personnes semble effectivement profiter de ces facilités qui restent, pour le plus grand nombre, une offre potentielle, notamment du fait des contraintes économiques, mais aussi familiales.Cette image d'un Paris culturel fonde très certainement pour partie un fort sentiment d'appartenance communautaire. Il en est toutefois un autre : celui de participer d'un univers où la performance et l'efficacité sont hissées à un haut niveau de réalité.
" Les immeubles, les résidences, les musées, des tas de choses à voir qu'on n'a pas en province. Ce sont aussi des racines, ne pas pouvoir vivre ailleurs. " (Groupe 6, 15ème arrondissement, quartier André Citroën)" Quand on retourne en province en vacances, on a l'impression qu'ils traînent. " (Groupe 6, 15ème arrondissement, quartier André Citroën).
A la notion de ville ou d'arrondissement, le Parisien substitue plus volontiers celle de quartier
Ce difficile apprivoisement de l'espace urbain parisien pris dans sa globalité concourt à faire du quartier l'échelon de référence en termes d'organisation des temps de vie. Paris, mais aussi les arrondissements apparaissent d'abord comme des échelons politiques, administratifs, mais semblent inadaptés aux critères de proximité recherchés par les habitants.
Dès lors la notion de quartier prend tout son sens. Celui-ci recouvre bien évidemment des réalités différentes, selon les arrondissements, mais se construit systématiquement autour de notions aussi " provinciales " que l'école, les commerces, la bibliothèque ou encore le marché. Il permet en tout état de cause de réhumaniser un espace jugé disproportionné - malgré les tentations hégémoniques du Grand Paris (évocations qui ne sont pas sans rappeler le discours anti-mondialisation par ailleurs), et offre au final une vision humanisée de la vie à Paris, en segmentant le temps " intra-quartier ", sur lequel on a prise, du temps " extra-quartier ", mal connu, mal maîtrisé.
" Je distingue deux choses, quand je vais au supermarché c'est stressant mais j'éprouve un plaisir fantastique à faire le marché. " (Groupe 2, 9ème arrondissement).
" On est dans une grande ville, dans un quartier. On bénéficie de la ville autour. C'est comme si on était dans un petit village. " (Groupe 6, 15ème arrondissement, quartier André Citroën).
" Il y a le 15ème sud qui est plus populaire. Le Nord est un peu mieux, mais tout est relatif. Le 15ème limite 14 c'est différent, l'identité n'est pas la même. On est obligé de descendre au métro Porte de Vanves pour aller dans le 15ème. Psychologiquement ce n'est pas la même chose. " (Groupe 5, 15ème arrondissement, quartier Procession / Quintinie).
" D'une rue à l'autre, ça change. Il y a Belleville, Ménilmontant, Charonne, Nation… " (Groupe 4, 20ème arrondissement)
Fiche technique :
Enquête qualitative sur les modes de vie et les attentes des parents parisiens réalisée pour la Mairie de Paris.